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- Musiques
Agé de 42 ans, le New-Yorkais avait imposé avec son partenaire Havoc un style âpre et ultraréaliste.
ParStéphanie Binet
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Depuis la mort le 20juin du rappeur Prodigy, membre du duo Mobb Deep, la planète rap est en deuil et semble ne pas se remettre de ce décès. Atteint de drépanocytose, une maladie génétique avec laquelle il vivait depuis son enfance, Albert «Prodigy» Johnson, 42 ans, semblait supporter son sacerdoce avec une telle résignation que ses fans et ses proches le croyaient invincible.
En tournée aux Etats-Unis avec un plateau d’artistes américains (Ghostface Killah, Onyx, Ice T), le rappeur de Mobb Deep a été hospitalisé à Las Vegas le 17juin après une nouvelle crise. Trois jours après sa mort, Havoc, son partenaire au sein du groupe, de retour à New York, leur ville natale, témoignait pour le site TMZ: «J’ai appelé notre road manager, et il me disait qu’il avait toujours mal mais que ça allait mieux, et puis le lendemain, il se remettait à marcher. Tout était normal. Il va à l’hôpital tout le temps, je ne m’inquiétais pas. Puis il y a eu des rumeurs comme quoi il était mort, alors j’ai appelé mon manager qui m’a confirmé en larmes… Je suis toujours choqué. Je l’ai rencontré quand j’avais 15 ans. Je n’arrive toujours pas à le croire. Je ne peux pas.»
Une façon particulière de poser les mots
En juin2014, avant leur concert à la Cigale, à Paris, c’est Prodigy lui-même qui racontait leur amitié au Monde: «Nous nous sommes rencontrés à l’école des arts et du design en1989 à Manhattan. Havoc voulait devenir architecte. Moi, je m’étais inscrit parce que mes amis fréquentaient cette école. Je me foutais un peu de l’art, en fait. A l’époque, j’habitais dans le New Jersey où ma mère m’avait emmené pour m’éloigner de mon quartier, Lefrak City, dans le Queens. La police m’avait arrêté avec du crack sur moi.» Havoc habite, lui, dans la cité voisine, Queensbridge, un des plus grands logements sociaux américains, qui va voir émerger quelques-uns des meilleurs artistes hip-hop des années 1990: Marley Marl, Nas et Mobb Deep, donc.
Les deux rappeurs vont avant leur vingtaine imposer leur style au rap mondial grâce au réalisme de leurs textes, l’âpreté des rimes, et une manière très particulière de poser les mots sur la musique. Faf Larage, un rappeur français qui a enregistré un titre avec Prodigy en2014, décrypte: «En écoutant leurs premiers albums, The Infamous et Hell on Earth, j’ai compris beaucoup de choses au placement des voix. Prodigy semblait rapper avec la bouche de travers. Il donnait toujours l’impression d’être en retrait, en retard sur les rythmiques.» Le décalage entre sa voix calme, glaciale, et les textes d’une extrême violence, qui racontent leurs cités minées par le trafic de crack et la profusion des armes, va créer un style qui va être copié et imité jusqu’en France, notamment par IAM sur L’Ecole du micro d’argent ou Lunatic pour Le Crime paie.
Leur premier album, Juvenile Hell (1993), est passé presque inaperçu. Mais le suivant, The Infamous (1995) contient des classiques, à commencer par l’incipit de deux minutes trente, écrit par Prodigy, The Infamous Interlude, où le rappeur se pose non pas en artiste mais comme un dealer qui rappe. Suit Survival of The Fittest et son piano entêtant, le fameux Shook Ones Part II, qui fera entrer le rap de rue dans les discothèques, et Temperature is Rising, qui raconte l’arrestation du frère d’Havoc pour meurtre.
Une famille de musiciens et d’intellectuels
Contrairement à son partenaire, Havoc, fils d’un chauffeur de bus et d’une employée de banque, Prodigy vient d’une famille de musiciens et d’intellectuels. Son arrière-arrière grand-père a fondé l’université afro-américaine Moore House à Atlanta (Géorgie). Son grand-père saxophoniste, Budd Johnson, a contribué à l’ère du be-bop, dans les années 1940, en jouant avec Earl Hines ou Dizzy Gillespie. Son père, Bud Johnson Jr., était membre d’un groupe de doo wop, The Chanters.
Dans sa biographie, My Infamous Life (2011), que le rappeur a écrit en prison de 2008 à 2011 où il avait été condamné à trois ans et demi d’incarcération pour port d’armes illégal, il avouera que c’est certainement sa maladie qui l’avait endurci, se montrant arrogant, violent pour faire oublier sa petite taille et son état chétif dans un univers où on accepte peu les faibles. Pendant les trois années de liberté conditionnelle qui l’empêcheront de donner des concerts en dehors de l’Etat de New York, il écrira aussi un livre de cuisine à partir des recettes qu’il concoctait en prison, pour redonner un peu de dignité aux détenus.
Stéphanie Binet
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